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Archive : samedi 15 mars 2014

Le vécu préfiguratif, Les apartés d'En Quoi Tu Crois Commentaires fermés sur 6 – L’intensité de l’instant

6 – L’intensité de l’instant
(publié sur Facebook le 09/09/2011)

Il y a un instant où le personnage doit happer l’acteur. C’est peut – être pendant les essais quand le subconscient commence à travailler sur l’histoire.
Dans la définition généralement admise de l’acteur (https://fr.wikipedia.org/wiki/Acteur), ce dernier prête son physique, ou simplement un aspect de ce dernier à un personnage.
Et le personnage, que prête – t -il à l’acteur ?
Il ne peut pas lui prêter son histoire. En effet, un personnage est une évocation mise en scène. Quelle que soit la série de bonheurs ou de malheurs qui forment l’instant mis en lumière, le personnage est une évocation pour l’acteur.
Ce dernier a généralement trouvé des solutions dans sa vie qui ont imprégné son subconscient au point que le rôle dans lequel il est entré, en oubli de tout, dans cet instant si intense, devient un instant éphémère replacé dans son histoire et par delà celle – ci dans celle de ses ancêtres.
Toute la vie du personnage va se résumer à cet entre – deux où les actions vécues dans la vie quotidienne par l’acteur et celles prêtées au personnage resteront dans une ambiguïté de comportement.
C’est comme si l’acteur se racontait à lui – même, superposant sur l’histoire du personnage les êtres de sa vie avec lesquels il vit une intensité, alors que le public perçoit d’autres personnes et peut même quelquefois l’effectuer en amalgame de sa vie personnelle.
Ce qui compte pour un acteur n’est pas le physique qui peut se prêter mais « le nom » qu’il est peut – être le seul à percevoir.
Ainsi, plus l’acteur peut introduire de stabilité dans sa vie en subconscient et plus il peut enchaîner les rôles, d’intensité de l’instant en évocation éphémère et dépassée.
Qu’est – ce que le subconscient ? C’est la partie qui émerge lors d’un rêve éveillé. Sans nul doute, vous vous êtes déjà retrouvé « acteur », en oubli de ce que vous appelez « la réalité », dans une espèce d’actualité intense qui se traduit en actes tenus par un personnage qui vous emporte auquel vous avez l’impression de prêter une partie physique et matérielle de votre « le moi – même » et duquel à la fin du rêve vous pouvez dire ce n’était pas réellement « moi ».
Sigmund Freud a écrit quelque chose dans le genre « les uns rêvent la nuit de ce que d’autres font le jour ».
L’acteur commence à rêver se prenant pour le personnage. Il doit donc se discipliner et savoir sortir de ce dernier afin de le laisser aller à sa vie propre.
Cette part événementielle sera reprise dans un rêve éveillé par des millions de spectateurs et dans une réalité ; un tournage pour l’acteur et un film pour le public.
Nous appartenons tous à un système social a minima qui implique notre entourage dans une continuité de réalisations et de projet qui englobe les vies de toute une suite générationnelle. On ne peut pas soumettre indéfiniment ces êtres qui ont accepté pour la pérennité de s’associer à nous, à la pression d’histoires qui nous plaisent mais qui, telles qu’elles, n’ont pas leur place dans notre vécu et dans une perspective d’avenir construit. L’acteur ne déroge pas à cette règle.
Il va alors conjuguer des événements qui, pour lui, restent dans son système social a minima mais qui, presque à son insu, sont physiquement repris par le personnage dans un axe coordonné d’actes semblables en matérialité. Seul l’éclairage sur l’axe du personnage et non de l’acteur, au final, rendra une histoire différente.
L’intensité de l’instant se présente en représentation spatio – temporelle comme l’intersection entre deux droites d’angle extrêmement réduit au départ. Puis, plus l’histoire du personnage se construit et plus leur faisceau s’éclaire vers l’infini donnant à la fin l’impression de deux parallèles.
Qu’est – ce qui aide à se « recentrer »sur son bout de chemin et à laisser les chemins de traverse passagers sinon une perspective de ce que l’on est et de ce que l’on veut être, marquée par cet effort de diriger sa vie dans un sens constructif ?
L’histoire du personnage doit permettre à l’acteur, dans le même temps, de revivre quelque chose de l’intérieur et d’observer le mécanisme de l’émotion qu’il veut peut – être canaliser et reproduire.
Comme tout le monde, il cherche à sublimer ce dernier, et à le corriger le cas échéant, dans sa perspective quotidienne, donc avec « les siens », son entourage en système social a minima. Plus ce dernier est pérenne et plus son effort de canalisation s’engage dans un cercle vertueux.
Il est bien évident que l’acteur veut s’éviter dans sa vie quotidienne, tout comme le public, ce que l’on appelle « les accidents de la vie ». Mais les émotions qui ont émaillé une erreur, perçue chez d’autres ou en soi, ne sont pas toutes « à jeter à la poubelle ».
La différence entre l’acteur avec le public est qu’il a une anticipation qui lui permet une sorte de délégation des événements à un personnage ; et non l’inverse. Cette anticipation est accompagnée d’une norme d’agissement.
Un acteur est donc quelqu’un dont l’aspect normatif lui permet de revivre l’intensité du moment dans une évocation réelle sans dévier de sa route personnelle.
Il peut ainsi prêter son physique, sa norme et une émotion intérieure à un personnage dans un événement indépendant du cadre de l’histoire, autant la sienne que celle de ce dernier. C’est le metteur en scène qui cherchera par la série événementielle à susciter, voire à orienter le subconscient du public, selon les objectifs recherchés par le producteur et les chaînes dans lesquelles il s’intègre.
La structure va aussi chercher à augmenter la stabilité intérieure en tant que perspective intégrée en message subliminal démarrant de l’acteur. Celle – ci va être analysée et utilisée par les metteurs en scène et les producteurs de façon à ce que le personnage permette une évocation supérieure à celle incluse dans le subconscient de l’acteur..
Pour que la recherche de la suite de l’histoire quasi inconsciente du public ne se déporte du personnage sur le nom mis sur le générique et que « le spectacle » soit recherché et « acheté », il faut :
que l’acteur donne au personnage tout ce qu’il a compris et corrigé de l’évocation, afin que le subconscient du public se perçoive concerné de près ou de loin, par quantités d’expériences à la fois proches et différentes.
qu’une fois qu’apparaît le mot « fin » sur l’écran, il y ait dissociation entre le nom qui apparaît sur le générique, l’histoire « réelle » et le physique du personnage. L’acteur sur la suite de l’histoire du personnage doit devenir neutre. Il est l’acteur avant d’être « un tel ». Cette distanciation permet plusieurs interprétations du personnage, donc différentes perspectives, certes dans la continuité de la première mais affinant l’histoire de ce qui émerge du subconscient du public.
Que l’acteur s’efface devant son personnage. Il y a des moments où il mémorisera de façon pérenne des jeux de scène laissant au personnage l’intensité de l’instant. C’est ce que l’on appelle « jouer » un personnage. Le personnage est toujours compris comme focalisant sur son ressenti.
Même l’acteur percevra, à la réflexion, en miroir, le personnage évoluant différemment de son « le moi – même » et comme le public il en retrouvera parfois les mimiques.

… Je vais vous laisser sur cette idée, j’ai un pulco citron qui m’attend, (sans sucre, donc non taxable). Je vais moi aussi réfléchir à tout ça, en mordillant ma cuillère en plastique, percevant bien son rebord acéré sur le bout de ma langue et en pensant « aux miens »…